Une théorie de l'intelligence
 
 
Auteur : Olivier Moch
 
 
 
Ou la notion d'une intelligence au mètre carré…
L'intelligence est, assurément, un concept nébuleux ! Ainsi nous sommes tous persuadés d'en être pourvu, y compris ceux dont le désert cérébral est aussi aride le Sahara. Et pourtant, un constat s'impose, cela ne fait pas diminuer le nombre de cons qui nous entoure ! Si l'on s'en réfère à Bob(1), l'intelligence est la faculté de comprendre par la pensée ; mais aussi l'ensemble des fonctions mentales ayant pour objet la connaissance conceptuelle et rationnelle… Fichtre ! Nous voilà déjà plus intelligent maintenant que nous savon cela.
 
Il s'en trouve encore pour croire que l'intelligence est forcément liée aux études. J'ai en mémoire une stagiaire universitaire en dernière année qui était capable d'expliquer en détail les théories de Lasswell, Shannon, Weaver, Jakobson ou Newcomb mais qui était totalement inapte à trouver un numéro de téléphone pour mener à bien le travail simple qui lui avait été confié. Et dire que quelques semaines plus tard cette charmante demoiselle allait être licenciée en communication… Si c'est ça l'intelligence, on n'est pas sauvé ! Mais alors qu'est-ce que l'intelligence ?
 
Il en existe une forme théorique, c'est certain. Elle se trouve dans les livres, dans les leçons, dans les laïus professoraux et s'apparente plutôt à une connaissance générale et variée. La stagiaire mentionnée plus haut en était bel et bien dotée. Il existe aussi une forme d'intelligence empirique qui nous permet, par exemple, de savoir que poser la main sur une plaque de cuisson qui fonctionne à pleine puissance n'est pas sensé. Cette forme manque cruellement aux décérébrés de Jackass (2). On peut encore évoquer la promptitude à réagir que certains peuvent développer face à une situation aussi inattendue que subite ; la débrouillardise et l'esprit d'à propos sont aussi des formes d'intelligence.
 
Mais alors, s'il existe plusieurs formes d'intelligence, comment peut-on expliquer le nombre de cons environnants ? A ce propos, j'aimerais développer une théorie qui m'est propre mais qui se confirme, à mes yeux en tous cas, un peu plus au quotidien.
L'intelligence globale est une somme donnée des différentes formes d'intelligences reprises précédemment répartie dans l'air d'un espace déterminé. Et au plus il y a de personnes dans cet espace, au plus l'intelligence ambiante diminue, se répartissant plus ou moins également quant aux nombres d'individus présents ! On peut allègrement résumer cette théorie ainsi : plus on est, plus on est con !
 
Des exemples ? Les joueurs de football… Le type qui va jouer son match de foot, sur le chemin, dans sa voiture il a l'air tout à fait normal ; si cela se trouve, il écoute même Mozart, Bach ou Brel sur son auto-radio. Lorsqu'il arrive dans les vestiaires et qu'il retrouve ses congénères, cela se corse déjà un peu plus… Premiers airs dits de motivation "On va les niquer, on va les niquer…" voire même dans certains cas poussés à leur paroxysme concours d'appendices mâles à celui qui aura le plus avantageux…
 
Mais la théorie que je développe se matérialise davantage au moment du but inscrit. Onze andouilles se jetant les unes sur les autres en émettant des borborygmes qui effrayeraient un singe de laboratoire, s'embrassant, se frottant… éphémère orgasme footbalistique. Cette scène de joie se passe, dans la majorité des cas, sur deux mètres carrés donc un espace réduit où la somme d'intelligence donnée est minime et répartie sur onze bonshommes. Le spectacle confirme que l'on a à faire à des cons et, par corollaire, donne du poids à ladite théorie.
 
Un autre exemple ! L'armée des milliers de cons habillés quasiment de la même façon et prêt à obéir aux injonctions données à l'ensemble par un seul d'entre eux. La théorie peut aussi se confirmer dans certains rassemblements de créatifs qui se réunissent pour brainstormer persuadés que cette mise en commun accouchera forcément de quelque chose de plus fort. Que nenni ! Une grande partie des publicités télévisuelles est confiée à ces brainstormeurs fous et la médiocrité de la plupart d'entre elles appuie un peu plus encore le raisonnement qui est l'objet de ce texte. Et des images de ce type, nous en avons tous plein nos mémoires. Il suffit de chercher un peu dans son entourage pour trouver l'un ou l'autre argument en faveur de cette théorie.
 
Je ne sais pas qu'elle est votre position à ce propos mais la mienne est figée, je suis un partisan avoué de la théorie de la somme d'intelligence au mètre carré. Aussi il m'apparaît de plus en plus important, au fil du temps qui passe, de limiter ponctuellement et géographiquement le nombre de personnes de mon entourage. Reste que dans certains cas, l'on est obligé de subir une pression due à la présence humaine, le travail en est un cas précis. Mais, vous conviendrez aussi avec moi que c'est souvent au travail que l'on est confronté à des situations dont la caractéristique première est un manque d'intelligence !
 
(1) C'est ainsi que je surnomme Le Petit Robert suite au degré d'intimité quotidienne qui s'est créé entre lu et moi.