A QUAND LE TRI TOTAL ?
Auteur Jean VILAIN
Ah que de
progrès depuis l'époque lointaine où les braves gens se contentaient de jeter
leurs ordures par la fenêtre au risque de verser le contenu d'un pot de chambre
sur la tête du malheureux quidam qui passait par là.
Depuis, nous
sommes passés de la décharge publique et du tas de fumier au ramassage pour tous
(ou presque). Même dans les campagnes.
Nous voici à
l'étape du tri sélectif. Les matières biodégradables d'un côté, le verre d'un
autre et enfin le papier et le métal dans un 2e sac. J'oubliais, il y a aussi un
ramassage cartons (en particulier pour les commerçants).
Il est
indéniable qu'il reste des progrès à faire. Dans un premier temps, il faut,
c'est évident, séparer le fer et le papier. Ce qui nous mène à 5
ramassages.
Toutefois, on
ne peut pas ne pas se faire la remarque que dans les matières biodégradables,
toutes ne devraient pas être traitées de la même manière. Ainsi, les
coquilles d'oeuf. Elles peuvent être une source de calcium appréciable. Si nous
mettions nos coquilles d'oeuf dans un sac séparé, qu'elles soit rassemblées dans
une usine de retraitement, ce serait moins de gâchis.
De même pour
les épluchures de patates. Nous faisons tous des épluchures bien trop épaisses -
(Je m'adresse là, aux quelques retardés qui ne se nourrissent pas encore de
frittes surgelées ou autres plats cuisinés en vente dans notre grand
supermarché) - Il serait possible de récupérer cette pulpe de pomme de terre et
d'en faire de la purée, par exemple. Il est donc évident qu'il est urgent de
mettre en service le ramassage des épluchures de pommes de
terre.
Si on tient
compte du nombre de légumes, fruits, curcubitacés, légumineux et autres denrées
qui pourraient être recyclées, nous arrivons à la conclusion qu'il faut, de
toute urgence organisé un service de ramassage pour 58 sortes de déchets
courants recyclables. (Bien sûr cette évaluation ne tient pas compte de déchets
rares, comme les oeufs de caviar, par exemple.)
Il est à
noter que cette initiative créerait des emplois. En effet, il parait impossible
que le service de ramassage des ordures d'une ville ( et ce qu'elle que soit sa
taille.) puisse passer de 5 à 58 ramassages différents sans embaucher. De même,
la multiplication des véhicules s'impose, d'où une augmentation substantielle de
la production automobile lourde. Ici aussi, cette demande créera la nécessité
d'investir dans de nouvelles chaînes de production, d'où de nouvelles
embauches.
Il n'en reste
pas moins que j'imagine mal 58 sacs de déchets divers dans un coin de ma
cuisine, ça ferait désordre. Il conviendra donc que chaque cuisine soit équipée
d'un local à déchets de taille respectable. Cette modification de l'habitat sera
bénéfique pour les entreprises de bâtiment qui se verront sollicitées pour mener
à bien cette tâche.
Je ne sais
pas si vous imaginez l'ampleur du marché concerné. Le chiffre reste à vérifier
mais on peut raisonnablement estimer qu'il doit y avoir quelque chose comme 30
millions de foyers dans notre beau pays. Cette formule de tri-total permettrait
donc la construction de 30 millions de locaux à ordures.
Que dire du
nombre de sacs plastiques qui seront nécessaires pour mener à bien ce projet ?
La demande sera multipliée par 29 ( étant donné qu'aujourd'hui seuls les
matières biodégradables non triées et le papier ferraille font l'objet de mise
en sac).
La
consommation ( à raison d'un sac pour chaque catégorie de déchets ) sera de
1.740 millions de sacs plastiques par semaine, ce qui pour une année nous mène à
89 milliards et 580 millions. Une révolution pour l'industrie du sac
plastique.Il faudra aussi construire des usines de retraitement et les faire
fonctionner. Il va donc de soi que dans ces conditions, nos presque 3
millions de chômeurs actuels ne seront pas suffisants pour occuper les postes
créés par cette formule de tri total. Nous serons contraints à avoir recours à
de la main-d'oeuvre étrangère.
Autres
conséquences: N'ayant plus de chômeurs, le pays fera de considérables économies,
le déficit de la sécurité sociale sera résorbé en 2 temps 3 mouvements et je ne
vous parlerais pas des rentrées fiscales diverses qui bénéficieront de cette
initiative (taxe professionnelle, impôts sur le revenu, impôts fonciers)
... Je suis même certain que d'autres avantages, auxquels je
n'ai pas songé, découleront de cette pratique.
Mais une chose est sûre : L'avenir sourit aux ordures !
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